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Pour le 1er anniversaire du site : un texte de Gérard Caramaro et la date de sortie du film !

Riquet - photoOn complète aujourd’hui la première année d’existence du site web Éloge de la suite lancé le 21 novembre 2014, date où Henri Laborit aurait eu 100 ans ! Donc avant de vous présenter la belle pièce de résistance d’aujourd’hui, un mot sur ce premier anniversaire.

À raison d’au moins un article par semaine, c’est donc plus d’une cinquantaine de textes mettant en valeur toutes sortes de documents écrits, audio ou vidéo faits sur, avec ou par Laborit lui-même qui se trouvent maintenant sur le site. En plus, bien sûr, de tout le matériel qui était déjà sur le site lors du lancement et qui est toujours accessible par le menu du haut de page.

Comme il n’y avait aucun site rassembleur digne de ce nom sur la vie et l’œuvre de Laborit, Éloge de la suite a eu l’effet rassembleur escompté, c’est-à-dire que beaucoup de gens se sont mis à m’envoyer des documents qu’ils avaient en leur possession sur Laborit pour que je les mette sur le site et que j’en fasse profiter gratuitement le plus grand nombre. À toutes ces personnes encore une fois un grand merci !

Et l’aventure est loin d’être terminée. À preuve, cette annonce que j’ai à vous faire concernant le film associé à ce site, tel qu’annoncé la semaine dernière. Car ce qui est assez rigolo, faut-il le rappeler, c’est que ce site web ne devait être au départ que la « vitrine » d’un film autour de Laborit, comme j’en ai fait bien d’autres pour accompagner mes autres films. Sauf que, comme vous le savez, la quantité de documents disponibles sur Laborit et l’absence quasi inexplicable d’un site pour les mettre en valeur a donné… l’année formidable qui s’achève !

Retour au film, donc, qui est le point de départ de toute cette aventure, et qui a fait lui aussi son petit bonhomme de chemin pendant tout ce temps-là. Vous en avez eu un court avant-goût lorsque j’ai sorti le 18 mai dernier ces premières minutes d’un film qui se cherchait encore sous forme de « bande-annonce ».

Et aujourd’hui je suis très content de vous annoncer que la « première » de ce long métrage (qui est la 2e partie de 4 de ce projet) aura lieu à Montréal le 13 février prochain à l’Auditoire, nouvel espace multifonctionnel et interculturel situé au 5214 boulevard St-Laurent !

Donc réservez dès à présent cette date à votre agenda et notez aussi que la semaine avant et la semaine après ce lancement se tiendra à l’Auditoire une exposition sur la vie et l’œuvre d’Henri Laborit !

Je ne vous en dis pas plus pour aujourd’hui, tous les détails de ces deux événements seront exposés ici le 9 décembre prochain, date où vous comprendrez mieux la structure de ce projet en 4 parties et l’importance de la symbolique des… dates qui s’y rattachent.

* * *

L’histoire qui a mené au texte que j’ai le grand plaisir de vous présenter aujourd’hui mérite d’être racontée. À l’automne 2011, je découvre avec ravissement un nouvel enregistrement audio d’une entrevue faite en 1984 avec Laborit. L’entrevue est présentée comme l’une des 5 qu’aurait accordée Laborit à Radio Libertaire et a été mise en ligne sur le site web Dailymotion par un dénommé Charles Volpones. Curieux, je lui écris pour savoir s’il a en sa possession les 4 autres et s’il a l’intention de les mettre en ligne aussi. Il me répond par l’affirmative et c’est ainsi qu’au fil des mois (car cela lui demandait tout un travail de numérisation) on a vu apparaître les 4 autres épisodes de ces entretiens très riches où Laborit démontre en plus une grande complicité avec la personne qui l’interview, un anar comme il se doit (on est à Radio Libertaire, la radio anarchiste, je le rappelle).

Comme cet animateur semble être très proche de Laborit, ce qui ne l’empêche pas de le confronter amicalement à maintes reprises, je cherche à savoir qui il est. Je suis d’abord orienté sur une fausse piste qui mènera tout de même à une belle rencontre que vous allez découvrir dans la 3e partie de ce film. Volpones remerciait en effet sur le site de Dailymotion un certain François Sébastianoff qui lui aurait rendu accessible les cassettes audio qu’il a numérisées. Renseignements pris auprès de Volpones, je comprends qu’il ne s’agit pas de l’animateur mais d’un militant anarchiste non violent qui habite le Cantal et que j’irai rencontrer et filmer en 2012 puisqu’il a correspondu par écrit avec Laborit !

Ce n’est qu’un peu plus tard, en fouillant sur le Net, que je suis tombé sur un article qui m’a révélé le nom de cet animateur tant recherché : Gérard Caramaro. À partir de son nom, j’ai pu découvrir qu’il était, entre autres, écrivain, et je lui ai lancé une « bouteille à la mer » sur Facebook, où apparaissait ce nom, pour lui signaler Éloge de la suite. Et c’était bien lui, car il m’a par la suite répondu et nous avons échangé quelques messages. Dans l’un de ceux-ci, il y a quelques mois, je lui demandais s’il ne voudrait pas écrire un petit mot sur les circonstances qui l’avaient amené à inviter Laborit à son émission. Et puis plus rien… jusqu’à il y a dix jours où je reçois de lui ce magnifique texte, empreint d’émotions.

Donc merci énormément M. Caramaro pour ces traces inestimables d’un moment fort de radio pour tous les « laboritiens », les libertaires et, j’en suis certain, pour toutes personnes qui écoutent encore aujourd’hui ces émissions maintenant accessibles ici sur Éloge de la suite grâce à la chaîne de solidarité décrite ci-dessus.

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Henri Laborit, l’homme lucide

S’il fallait en inviter un à l’antenne, c’était bien ce trublion, libertaire devant l’éternel. Nous avons donc appelé le laboratoire d’eutonologie, à Boucicaut, Paris, où officiait Henri Laborit.

Son assistante, Jeannine, à l’énoncé de nos qualités, s’en alla chercher Henri au fond du labo. Il prit soin d’exhiber son masque bougon. « Oh ! encore… Non, vous ne vous rendez pas compte du travail que j’ai ! Vous êtes qui, déjà ? Ah ! Radio-Libertaire, les anars… Bon. Voyez ça avec Jeannine. Mais je vous préviens, il faudra venir me chercher et me ramener ! Les anars… bon, bon. C’est différent, d’accord. » Nous étions à l’été 1984.

C’est ainsi que débuta pour nous une véritable aventure. Sans doute pour ce qui me concerne celle qui me marqua le plus. Nous avons enregistré cinq émissions de deux heures chacune. Si la qualité sonore de ces enregistrements est loin d’être parfaite, au vu de nos moyens, ils demeurent un témoignage hors de pair de ce que pensait l’anarchiste Henri Laborit. Parler de l’anarchiste Laborit n’est pas de la récupération. C’est ce qu’il disait de lui-même, et on peut l’entendre dans une de nos douces disputes à l’antenne me dire : « Je suis plus anarchiste que vous ! »

Par la suite, et beaucoup de media professionnels pourraient y réfléchir, Henri me dit que ce qu’il lui avait plu d’emblée, c’était de pouvoir disposer à chaque émission de deux pleines heures pour s’exprimer. Un vrai temps confortable pour développer ses thèses et expliciter sa vision peu ordinaire du monde.

Et une véritable amitié entre Henri Laborit et moi-même naquit de cette série d’émissions.

Ni dieu ni maître, certes, sauf Henri Laborit ! Mon apprentissage se fonda à partir de son regard sur toute chose. Je m’explique. Il portait sur le monde en général, les êtres humains en particulier, leurs structurations, et aussi leurs trucs et manigances, ou leurs embellies, un œil sans concession et sans haine –Henri était incapable d’être haineux–, et d’une justesse qui me confondait. Jamais auparavant et jamais plus je ne rencontrai d’homme si perspicace, si juste, si clairvoyant.

Je me souviens de ce jour où l’on rapporta qu’une femme avait été violée devant tous en plein jour sur un grand boulevard parisien. Ivan Levaï, d’Europe 1, téléphona à Henri pour un commentaire à chaud de cette actualité. Henri lui répondit qu’il trouvait cet événement parfaitement normal. Ivan Levaï s’en offusquait quand Henri lui retourna cette question : « Que pensez-vous de cette société, cette société qui ne pense qu’au fric et qui affiche tous les vingt mètres des panneaux publicitaires avec de très jeunes femmes aux trois quarts nues et s’étonne par ailleurs d’exciter par là même la libido de brutes frustrées ? » Il fallait oser le dire. Il était aussi quelqu’un d’ailleurs, de totalement immergé dans son travail. Pas le genre à regarder la télé ou lire des magazines. Aussi, un jour que, invité sur un plateau de télévision, on lui annonça qu’il y serait au côté de Michèle Morgan, immense actrice française célèbre s’il en fut (Quai des brumes, avec Jean Gabin), il demanda benoîtement : « Qui est-ce ? »

Un autre trait remarquable de son caractère était l’audace. Oser est un terme bien banal, pour ce qui concerne Henri Laborit. C’est bien simple, il n’était qu’audace. Audacieux avec une calme nonchalance. D’apparence. Parce qu’Henri bouillait sans arrêt. Sa nature était celle d’un créateur, d’un visionnaire, accompagnée d’une soif d’expliquer, de transmettre, de faire connaître. Voir le nombre de ses livres de vulgarisation. Il y avait certes un plaisir personnel dans les discours qu’il adressait à un public, il ne s’en cachait pas, confinant peut-être même à un certain ravissement. Tant d’intelligence, de charme, et de cœur, d’érudition l’emportaient toujours. Nous emportaient toujours.

Il est nombre d’anecdotes savoureuses que l’on pourrait rapporter sur Henri. Mais j’aurais peur de le trahir parfois, et puis, décédé, il faut bien réaliser qu’il ne s’appartient plus tout à fait à lui-même, et il est dorénavant des gardiens de sa mémoire plus patentés que d’autres. Je ne parle pas de son œuvre, lisible et interprétable par tous, mais plutôt de sa vie intime. J’y ai vu un homme libre, mutin, sémillant.

Moi j’emporte le souvenir très vivant d’un personnage d’exception, hors du temps et à la fois très présent. Un chevalier en quête incessante des vérités, pourfendeur des idées reçues et pestant contre la « soupe de préjugés » qui nous englue et nous laisse croire que l’on sait ! Un combattant plein de charme, d’élégance et de vitalité que la vie passionnait. Un honnête homme, un d’Artagnan de la conscience, un ami.

 

Gérard Caramaro

 

8 réflexions sur “Pour le 1er anniversaire du site : un texte de Gérard Caramaro et la date de sortie du film !

  1. Je ré-écoute toujours avec un grand plaisir les 5 entretiens de Laborit à Radio Courtoisie !

    Sinon, j’espère que votre long-métrage à venir sera disponible d’une façon ou d’une autre (à l’achat/téléchargement, etc…) pour celles et ceux n’ayant pas la chance d’être sur place, pour le voir en salle.

    Merci encore pour ce site !

      • Oups… Bonsoir M. CARAMARO.

        Je viens de réaliser la grosse “bourde” de mon commentaire… Je vous prie de bien vouloir m’en excuser.

        Alors, que j’avais éteint mon ordi pour ce soir, et étais en train de relire un chapitre de “Biologie et structure” de Laborit avant de me coucher, cette possible confusion entre les 2 radios m’est venue à l’esprit… Je me suis donc reconnecté illico et constate en effet mon erreur, plutôt maladroite/voire incompréhensible (compte tenu des sensibilités idéologiques respectives des 2 radios, plutôt aux antipodes)… Je vous prie de bien vouloir m’en excuser encore une fois. Il s’agit d’uune “simple” erreur d’inattention/confusion tout à fait involontaire… Que je n’arrive à m’expliquer d’ailleurs que par le caractère très marqué / non “main-stream” de chaque radio… C’est le seul point commun me venant à l’esprit qui me semblerait expliquer cette confusion par inattention en tapant mon commentaire).

        … Merci encore pour la qualité de vos 5 entretiens radio avec Henri LABORIT, mélangeant de façon très agréable discussions sérieuses, de fonds et touches d’humour fort appréciables… 🙂

  2. Je veux ici remercier Bruno Dubuc pour le travail formidable qu’il a entrepris sur Henri Laborit. Son site est une mine sans pareille d’informations autour d’Henri. Bruno possède, de plus, le talent, intellectuel et artistique, et aussi le cœur et la convivialité. Bravo ! et merci encore.

    • Merci d’avoir pris la peine d’écrire ces bons mots sur mon travail, Gérard. Ça me touche et ça m’encourage à continuer. Et une fois de plus, merci à vous d’avoir tenu votre promesse, et de si belle façon !

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